De l’inconvénient de juger les autres et de leur faire la leçon

Pourquoi détestons-nous autant nous sentir jugés, critiqués ? Pourquoi réagissons-nous vivement quand on nous fait la leçon ? Parce que, bien qu’étant des adultes, nous nous sentons traités comme si nous étions des enfants face à des parents autoritaires qui nous jugent et nous dévalorisent. Nous sommes coincés en position basse, en position de dominés et, comme le disent les analystes transactionnels, nous réagissons alors automatiquement depuis notre état du moi Enfant, face à un interlocuteur se trouvant dans l’état du moi Parent[1].

L’état du moi Enfant est la partie la plus ancienne de notre personne. Elle contient les traces partiellement oubliées de l’enfant que nous avons été, avec ses sentiments et ses pensées se manifestant par des comportements caractéristiques de cette période : tantôt c’est la soumission, tantôt c’est la rébellion face aux figures parentales ; tantôt aussi ce sont les questions témoignant de la réflexion, le jeu libre avec les camarades comme c’est le cas dans la cour de récréation.

Nous retrouver dans notre état du moi Enfant n’est pas toujours agréable. Rappelons-nous la frustration, le chagrin, le sentiment de rejet ou d’abandon, l’obligation de faire semblant d’accepter les décisions des grandes personnes, les humiliations en classe quand on ne donnait pas la bonne réponse !

Il n’est pas étonnant que tous ces souvenirs nous fassent détester les jugements et les réprimandes qui nous sont adressés. Et pourtant, à la première occasion, nous faisons pareil. L’expression « revoir sa copie », par exemple, est constamment utilisée dans le monde du travail, à la radio et à la télévision. C’est comme si même le gouvernement pouvait être un mauvais élève qui n’a pas bien travaillé. Comme si nous étions enfin à la place du maître ! Cette place du maître, comme elle est fantasmée !

En effet dans la vie de tous les jours nous nous exprimons volontiers depuis notre état du moi Parent.

C’est la partie de notre personnalité qui a engrangé les caractéristiques de nos deux parents et des figures parentales très proches. Leurs manières de penser traduites dans les discours qu’ils tenaient sur les comportements des autres, sur la vie et sur le monde , leur manière de se conduire, leurs sentiments, exprimés au niveau non verbal, sont là dans notre mémoire, à la fois oubliés et accessibles. Ils nous ont servi jusqu’ici de repères et de modèles, qu’ils soient positifs ou négatifs. Les aspects négatifs sont dans la critique systématique, les jugements péremptoires, les dévalorisations qui font mal. On parle dans ce cas du Parent Critique. Nous aborderons une autre fois les aspects positifs.

Dans nos relations avec notre famille, nos amis et nos collègues, méfions-nous de la tentation de juger les autres et de leur faire la leçon. Evitons les formules comme :

  • C’est ça qu’il faut faire et pas ça !
  • Ma pauvre, mon pauvre, tu n’y es pas !
  • Tu es nul, ou quoi ?
  • Les gens comme il faut ne font pas ça !
  • Tu écris dans un torchon !

Ce n’est pas seulement le contenu de ce qui dit et sa formulation, mais le ton (parler fort, de manière péremptoire, avec assurance), les gestes et les mimiques, l’état d’esprit d’un parent qui sait mieux que l’autre ce dont il est question !

Quand nous nous comportons ainsi, nous prenons le risque de provoquer la rébellion ou la soumission apparente. Nous n’avons aucune chance d’établir un dialogue véritable.

Ces comportements sont le plus souvent automatiques et non conscients ; ils ont été appris. Certains peuvent les adopter délibérément, pour exercer leur pouvoir sur autrui, mais ce n’est pas obligatoire.

Je vous invite donc à prendre conscience de la présence en vous d’un état du moi Parent ayant tendance à juger de tout et je vous conseille de lui faire la chasse chaque fois que vous souhaitez le dialogue et la tendresse. C’est ainsi que vous pourrez rester bien dans vos relations.

[1] L’analyse transactionnelle distingue l’état du moi Parent ou l’état du moi Enfant d’une personne qui est un parent ou un enfant en utilisant une majuscule pour désigner l’état du moi.

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